Dernière modification : 17.06.2020
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Ce qu'est un client
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* CE QU'EST UN CLIENT *
LE CLIENT, est la Personne la plus importante de notre maison, qu'il se manifeste en Personne, par écrit ou par téléphone, il est Roi et mérite le Respect absolu.
LE CLIENT ne dépend pas de nous c'est nous au contraire qui dépendons de lui.
LE CLIENT n'est pas un géneur; il n'interrompt pas notre travail, il en est le but. Nous ne lui faisons pas de faveur en le servant, c'est lui qui nous en fait une en nous donnant l'occasion d'agir ainsi.
LE CLIENT est un personnage qui nous exprime ses désirs; c'est notre métier de les réaliser le plus heureusement pour lui et pour nous-mêmes.
- J'ai découvert ce texte étonnant affiché dans le hall d'un hôtel
à Abidjan (l'Hôtel Résidence Koriet, à Cocody), en Côte d'Ivoire. C'est, de manière peut-être sentencieuse, un excellent rappel de ce qui devrait être le fond de jeu commun à toutes les activités de service. Le client ne peut jamais déranger ! Car le seul moyen de ne pas être dérangé serait donc de ne pas avoir de client. Situation absurde, bien entendu, puisqu'alors il n'y a plus d'activité, et donc l'idée même de client disparaît. Le serpent se mord la queue et on est hors-sujet...
- Henry FORD disait quant à lui que
c'était le client qui payait les salaires. C'est plus lapidaire, mais ça veut dire la même chose.
- Quant à Auguste DETŒUF, sa formule est encore différente, mais porte encore le même message : "Ne vous plaignez jamais d'un client difficile, car il est la cause de vos progrès. Traitez les autres mieux encore : ils sont les raisons de vos bénéfices".
- Bill GATES, lui, s'en tient à un laconique "La meilleure des publicités est un client satisfait".
Les mauvais réflexes
L'image ci-contre (photo prise au printemps 2013) est anecdotique, mais elle montre à quel point on peut parfois déconnecter totalement l'objectif même d'une activité (le service client) du légitime besoin des travailleurs d'œuvrer dans le calme. En l'espèce, il s'agit de deux feuilles au format A4 sur une porte d'accès, dans l'espace public.- Mais, dans l'équipe, on aurait dû trouver quelqu'un qui réagisse à l'affiche. Le caractère antinomique, et même provocateur, de l'association, sur un même support, des expressions "service client" et "interdit au public" aurait dû sauter aux yeux d'au moins une personne. Ne rien écrire aurait été préférable !
- Même lorsque le service communication élimine ce genre de message malencontreux, on rencontre des individus qui agissent comme si les clients les importunaient. En début d'année 2013, je me suis retrouvé à faire la queue derrière une dizaine d'autres personnes, attendant mon tour de faire changer un billet d'avion.
Le responsable de ce comptoir "service clients" de la compagnie qui me mettait en retard en m'ayant fait rater la correspondance entre deux vols qu'elle assurait elle-même, faisait les cent pas, surveillant les trois hôtesses qui s'occupaient des clients en souffrance, mais dédaignant le poste informatique libre qui lui aurait permis d'accélerer le processus (en avait-il seulement la compétence ?) Puis, avisant une de ses collègues qui passait à cet endroit de l'aérogare, il a prononcé cette phrase ahurissante : "Eh, qu'est-ce qui vous prend ? Vous nous envoyez des clients ! Vous ne pouvez pas les traiter là-haut ?".
J'affirme que ce monsieur, infiniment mieux payé que les femmes de ménage de l'hôtel ivoirien (voir l'affichette ci-dessus), n'a rien compris à son métier. Et que la compagnie qui l'emploie gagnerait à l'affecter à un poste plus en rapport avec ses compétences limitées.
Lorsqu'on n'écoute pas le client...
- Il existe des situations comme celles décrites ci-dessus, dans lesquelles certains acteurs peuvent penser que l'organisation doit être mise en place pour leur confort. Ce sont par exemple des structures tellement grosses que l'acteur n'a plus conscience de son rôle, ne sait plus faire le lien entre son activité instantanée et l'objectif global de son entreprise. Cela peut aussi être le cas lorsque l'organisme est en situation de monopole. Dans ce cas, le client reviendra, même mécontent.
- Lorsqu'on n'écoute pas le client, les acteurs vont avoir tendance à s'organiser de manière à ce que leur activité soit la plus confortable possible. Entendons-nous bien, ils ne vont pas en faire le moins possible, ils vont travailler leurs 8 heures (ou 7 heures) quotidiennes, mais en faisant en sorte d'optimiser leurs indicateurs locaux.
- L'exemple le plus caricatural (j'insiste : c'est une caricature, un dessin à gros traits, donc forcément injuste mais qui part d'une réalité indiscutable), l'exemple le plus caricatural, donc, est pour moi celui de l'Éducation Nationale. Envoyer, dans les établissements les plus difficiles, devant les élèves les plus en souffrance - et les plus en manque de savoir, les professeurs les moins aguerris témoigne à l'évidence une organisation tournée vers la satisfaction des professeurs les plus compétents (et les plus anciens). Et donc, dans l'échelle des priorités, les besoins des clients passent au moins en second. Si on ajoute à cela les emplois du temps dans lesquels quelques lycéens, dans certains établissements, peuvent accumuler jusqu'à trois heures de permanence dans la journée, ou encore les dates des vacances scolaires qui sont fixées de manière à optimiser le remplissage des stations de sports d'hiver, on ne peut plus avoir de doutes.
L'absurde va même plus loin. J'ai récemment entendu une syndicaliste enseignante reprocher à son ministre d'avoir concocté une modification des programmes sans impliquer les enseignants. Je crains que cette honorable personne ne fasse erreur. À l'intérieur de leur processus, les enseignants ont comme rôle de faire passer les savoirs. Pas de déterminer ce qui doit être transmis. Un professeur est un peintre (acceptez-en l'idée, c'est juste pour prendre un exemple). Il sait comment préparer les supports, combien de couches il faut passer, dans quel sens et quel est le temps de séchage entre deux. Il peut même donner un avis sur la qualité de la peinture à utiliser dans telle ou telle situation. Mais il n'a pas vocation à choisir la couleur. Seul le client peut choisir la couleur.
Pour revenir aux programmes scolaires, le ministre doit s'entourer d'experts qui savent à quel âge et dans quel ordre on doit aborder les notions. Il se peut que ces experts soient aussi des enseignants. Mais c'est en tant qu'experts qu'on doit les écouter. Pas en tant que transmetteurs de savoir, c'est à dire acteurs du processus. Néanmoins, s'il s'avère que le système ne fonctionne pas, les professeurs seront aux avants-postes pour le constater, et il faudra bien entendu que le pilote du processus entende leurs remarques et les prenne en compte pour faire évoluer ce système défaillant. Loin de moi l'idée de nier les compétences des membres du corps enseignant, je ne fais que remettre à leur places respectives les responsabilités des uns et des autres.
En conséquence, il faudra demander aux clients (et aux parties intéressées) ce qu'il convient de transmettre comme savoir(s). Ce qui va immanquablement conduire à interroger en cascade les universités et formations supérieures (puisque plus de la moitié d'une tranche d'âge poursuit des études après le baccalauréat), et les employeurs (puisqu'un des buts de l'institution scolaire est de contribuer à la formation de citoyens insérés dans le tissu socio-économique). - Je suis conscient que ce qui précède peut représenter une rupture significative avec les pratiques. Mais ce sont des révolutions qui peuvent avoir lieu. Le monde médical a connu cela au cours des dix dernières années. Le patient s'est vu reconnaître des droits, et les personnels soignants et médicaux ont perdu du même coup une partie de leur pouvoir. Mais aujourd'hui, plus personne ne remet cette évolution en cause.
- Autre exemple : les banquiers américains ont oublié quel était leur métier et, au lieu de se soucier du bien-être de leurs clients, ils se sont organisés de manière à maximiser leur propre revenu, quitte pour cela à dépouiller les plus pauvres d'entre eux (qui sont aussi leurs concitoyens). Dépouiller son client ! Un bon moyen pour ne plus en avoir (de clients), donc plus d'activité ! Mais qu'enseigne-t-on dans les écoles de commerce et les facultés d'économie ? Et comment (sur quels critères) sélectionne-t-on les dirigeants des banques ? Résultat : la crise des subprimes, qui a durablement mis à mal l'économie mondiale.
Le traitement des plaintes et réclamations
- Toutes les entreprises enregistrent les plaintes et réclamations; c'est même très souvent l'un des indicateurs incontournables de la qualité réalisée - ou de la qualité perçue, la distinction n'étant pas toujours bien claire.
- Mais même ce simple exercice d'enregistrement donne parfois lieu à des pratiques étranges. La plus répandue d'entre elles étant l'acceptation –ou le refus– de la réclamation en question. Il arrive en effet que l'entreprise qui reçoit la réclamation considère qu'elle n'y est pour rien, que cette réclamation ne doit pas impacter négativement ses résultats. Un exemple typique est celui de la biscuiterie industrielle qui reçoit une réclamation d'un client, se plaignant d'avoir découvert des miettes dans le paquet lorsqu'il l'a ouvert. L'usine qui a fabriqué le paquet n'a pas pu remplir le paquet avec des miettes. Un biscuit fendu ou cassé, peut-être, mais pas des miettes. La machine de conditionnement ne peut tout simplement pas remplir le paquet avec des miettes. C'est ce que le paquet a vécu ensuite qui a généré les miettes : il est tombé, peut-être même plusieurs fois; c'est même peut-être le consommateur tout seul qui est le responsable. Donc : voici une réclamation qui ne sera pas prise en compte, qui ne sera pas "acceptée".
Cette approche me semble très dangereuse, et ce pour plusieurs raisons :- D'abord, seul le client décide de ce qu'est la qualité. S'il est insatisfait, il a raison de le faire savoir. Et l'entreprise a tort de ne pas l'entendre. Car enfin, pour le client, connaître la responsabilité ultime de la défaillance n'est pas le problème ; il a une mauvaise expérience avec un produit, il y associe la marque. C'est la marque qui va en souffrir, c'est donc à elle d'agir.
- Ensuite, parce que le fait de choisir ce qu'on prend en compte ou pas est le premier pas sur un chemin glissant. Le risque existe qu'on se mette à ne plus accepter grand-chose, ce qui aura deux conséquences : la vision du niveau de qualité sera déformée, mais surtout, le niveau d'exigence interne risque de diminuer – puisqu'on ne considèrera pas la non-conformité résultante comme assez importante pour être traitée.
- Enfin, l'entreprise a tort de penser qu'elle ne peut rien faire. Il y a toujours des mesures à prendre. Pour notre biscuiterie industrielle, on pourrait imaginer changer de recette (pour rendre les biscuits plus résistants), changer d'emballage (pour un plus résistant), changer de transporteur (pour un moins brutal), utiliser un emballage transparent (pour éviter que le client n'achète à l'aveugle), etc. La seule limite étant le rapport cout/bénéfice de tels changements.
- D'abord, seul le client décide de ce qu'est la qualité. S'il est insatisfait, il a raison de le faire savoir. Et l'entreprise a tort de ne pas l'entendre. Car enfin, pour le client, connaître la responsabilité ultime de la défaillance n'est pas le problème ; il a une mauvaise expérience avec un produit, il y associe la marque. C'est la marque qui va en souffrir, c'est donc à elle d'agir.
Les clients peuvent-ils mentir ?
- Malheureusement, oui ! J'ai été responsable qualité dans une entreprise agro-alimentaire qui commercialisait 80% de sa production en France, et 20% entre la Belgique et les Pays-Bas. Nous n'avions jamais de réclamation pour présence de morceaux de verre en provenance de France ou de Belgique, alors qu'il en arrivait en moyenne une par semaine depuis les Pays-Bas. Les probabilités étant ce qu'elles sont, je peux affirmer sans l'ombre d'une hésitation que nous étions en présence, dans une grande majorité des cas au moins, de menteurs.
- J'ai vu aussi un industriel déclarer "cassé à réception" une livraison sur trois. Il renvoyait les tubes cassés et l'emballage - qui ne présentait aucune trace suspecte. Mais il faut dire que le produit était extrêmement coûteux (de mémoire, 122 Francs de 1980 le demi-millilitre – 40 000 € le litre...) Et comme mon job d'été consistait à conditionner ces produits avant expédition, je m'étais senti responsable de cette non-conformité. Mais mon responsable d'alors avait haussé les épaules en me disant "Nous affichons systématiquement les réclamations pour vous rappeler l'importance de votre travail. Mais avec ce client-là, c'est réglé comme du papier à musique : nous savons à l'avance quel lot sera déclaré cassé à l'arrivée !" Nous étions au service expédition, pas au service commercial. À l'époque, je crois bien que j'aurais recommandé de ne plus livrer ce client, ou de lui faire prendre systématiquement une assurance dommages...
- On villipende souvent le manque d'éthique des industriels, mais on peut aussi montrer que des individus peu scrupuleux savent fort bien exploiter les failles du système, et se faire injustement rembourser des articles sans défauts.
Répondre au client
- Puisqu'on a décidé d'enregistrer toutes les réclamations, il faut répondre au client mécontent. Mais cet exercice n'est pas toujours facile.
- La Poste, par exemple, utilise une solution qui a le don de m'énerver (j'exagère un peu : cela m'est arrivé une fois seulement, et il y a plusieurs années). Je reconnais que j'étais fautif : j'ai envoyé une lettre à Paris, rue de Clichy, et j'ai mis un mauvais code postal : 75008 au lieu de 75009. Tout le monde sait ça – ou du moins, tous les facteurs parisiens savent ça, me direz–vous ? Peut–être, mais toujours est-il que ma lettre a été marquée d'un "voie inconnue dans l'arrondissement", et qu'elle est partie se faire trier à Libourne, telle une lettre au Père Noël. Comme j'avais mis mon nom et mon adresse au dos, les choses ont été facilitées. La lettre m'est parvenue ... 45 jours plus tard. 45 jours, c'est beaucoup. J'ai eu le sentiment d'être puni pour mon erreur – ce qui serait le comble pour le client d'une entreprise de service ! J'ai donc décidé de tester le service consommateur de notre "opérateur historique" français.
On trouve (mais il faut un peu chercher) un formulaire pour écrire une réclamation sur le site Internet de La Poste. On peut détailler les circonstances, mais il faut le plus souvent choisir dans des listes de situations prédéfinies. Une fois le questionnaire rempli, on vous indique que le plus grand soin sera apporté à traiter votre réclamation.
Et quelque temps plus tard, j'ai reçu une lettre visiblement écrite par un script, par un robot, qui reprenait en faisant des phrases tous les éléments que j'avais moi–même indiqués ("Vous avez posté à telle date dans la boîte aux lettres de telle rue une lettre, etc."). Puis plus rien.
Vous voulez connaître le fond de ma pensée ? J'ai eu (et j'ai toujours) l'impression qu'on se moquait de moi. Entendons-nous bien : je ne dis pas que l'incident n'a pas donné lieu à une analyse suivie d'une action. Je n'en sais rien. Je le souhaite, voilà tout. Non, ce qui ne me convient pas, c'est ce manque de respect qui consiste à faire croire que la demande des clients est traitée de manière personnalisée, tout en procédant de manière si grossière que l'on sait que personne ne s'y laissera prendre. - Que fallait-il faire, au niveau de la communication ? Simplement faire savoir au client que sa demande avait été prise en compte. Et, sur le site Internet, j'avais eu droit à une boîte de dialogue qui me l'avait confirmé. Je me doute bien qu'une entreprise qui réalise chaque jour plusieurs dizaines de millions d'opérations physiques doit recevoir "un certain nombre" de réclamations, et la mienne n'avait rien de bien extraordinaire. J'aurais compris de ne pas obtenir de réponse personnalisée. Mais là, la réponse a été mal perçue. Rien de pire (en ce qui me concerne) que de se rendre compte que votre interlocuteur fait juste semblant de vous écouter et de vous prêter attention.
La voix du client
- L'entreprise a tout à gagner à s'imprégner de ce qu'on appelle "la voix du client", c'est à dire ouvrir tous les canaux de communication imaginables pour écouter les clients :
- Les réclamations et plaintes (qui sont, on l'a vu, un moyen incontournable),
- le standard téléphonique, trop souvent négligé,
- bien entendu, les commerciaux,
- les agents commerciaux aussi, mais les interroger est plus délicat qu'interroger les commerciaux salariés de l'entreprise : ils sont à mi-chemin entre l'organisme et ses clients (ce qui signifie qu'il faut les écouter deux fois – lorsqu'ils représentent le client final et lorsqu'ils parlent en leur nom. La situation est assez similaire avec les distributeurs du produit),
- le service après-vente,
- les installateurs ou monteurs (dans le cas de produits complexes),
- de plus en plus, ce qui se dit sur les réseaux sociaux (avec des pincettes, puisqu'on n'est, ici moins qu'ailleurs, jamais certains que les commentaires soient absolument sincères).
- Les fournisseurs font parfois entendre des remarques ou suggestions. On aurait tort de les traiter par le mépris. En effet, l'organisme et ses fournisseurs ont un objectif commun : ils souhaitent tous les deux que l'organisme rencontre le succès. Ils doivent donc travailler ensemble, et si on peut aider son fournisseur, de quelque manière que ce soit, ce sera souvent pour un bénéfice réfice réciproque.
- Dans le même ordre d'idées, on aura profit à écouter aussi les prestataires logistique, qu'ils soient affrêtés par les fournisseurs, par les clients ou par l'entreprise elle-même,
- les consultants et agences multiples (marketing, communication, recrutement ...) qui renvoient eux aussi une certaine image de l'entreprise et de ses produits,
- les audits divers, qu'ils soient internes, de seconde ou de tierce partie,
- les inspections des services de l'État,
- les contacts que l'entreprise peut avoir avec son voisinage immédiat : riverains, autorités locales, associations.
- Ensuite, bien entendu, il faut analyser les informations ainsi recueillies, en tirer des enseignements et agir !
L'écoute active du client
- Les moyens à mettre en œuvre sont minimes : il suffit de pouvoir enregistrer toutes les informations qui arrivent, afin de pouvoir disposer de matière première lors de la phase d'analyse.
- La chose la plus difficile à mettre en place, c'est comme souvent l'indispensable révolution culturelle qui fera que l'on va se mettre à réellement écouter le client, avec la volonté d'essayer de comprendre ses attentes. Il faut pour cela oublier
les mauvais réflexes qui consistent à penser (et à dire) "Mais qu'est-ce qu'il y connait ? Depuis le temps que nous sommes leaders sur ce marché, nous saurions s'il fallait faire autrement !" ou "Ah, si ce client voulait avoir mieux, il n'avait qu'à payer plus cher !" ou encore "moi, je fais comme on a prévu – et c'est ça, la qualité !"
- Si vous pensez que je force le trait, vous n'avez pas complètement tort, dans la mesure où l'on n'a généralement pas le sentiment de s'asseoir sur les attentes de son client. C'est en effet en toute bonne foi que chacun aura tendance :
- à faire passer en premier les directives qu'il ou elle aura reçues (la qualité, c'est suivre les modes opératoires),
- ou à appliquer les recettes qu'on lui a enseignées (la qualité, ça passe par le respect des traditions, par le savoir–faire),
- ou encore à s'en remettre à sa propre expérience (la qualité, c'est le service, c'est à dire faire en sorte que le client ait ce dont il a besoin, même quand il ne sait pas exactement de quoi il s'agit).
- Ainsi, comme dans tout projet, il faudra prêter une attention particulière à la résistance au changement.
Je veux enfin vous montrer ici un exemple d'une entreprise qui sait écouter ses clients. Il s'agit d'une chaine de restauration rapide britannique, qui rencontre un beau succès puisqu' en 25 ans, ils ont ouvert pas loin de 300 points de vente (la majorité au Royaume-Uni, mais aussi à Hong-Kong, aux USA et à Paris). Leur segment : le sandwich (la soupe, la salade de fruits...) préparés sur place, avec des ingrédients frais, sans produits chimiques. Ils expliquent comment ils travaillent avec leurs fournisseurs pour avoir du jambon, ou de la pâte wasabi qui correspondent à leur standard.
Dans les points de vente (propres, qui ne sentent pas le graillon), on trouve en évidence les cartes de réclamation, sur lesquelles il est indiqué qu'ils préfèreraient que vous sollicitiez directement le responsable. Sur leur site internet, plusieurs pages consacrées à reçevoir les réclamations, les suggestions et même les félicitations des clients ! Vous pouvez même avoir un contact direct avec le Président-Directeur Général... Il est vrai que sur la partie française du site, on est dans du traditionnel, impersonnel et moins direct. C'est ainsi, nous devons être moins faciles à convaincre...D'ailleurs, je ne peux qu'accepter avec respect, tout en la regrettant vigoureusement, la décision du webmaster, qui redirige automatiquement sur le site français les requêtes faites sur le site anglais. Pour voir les pages que je recommande, il va vous falloir de la détermination, et commencer par aller sur la racine du site, puis naviguer.
Si malgré tout je peux faire une critique : leurs prix sont élevés. Mais c'est bon. Et comme ils ne conservent rien d'un jour sur l'autre, ils recherchent des associations humanitaires pour leur offrir les restes. Qualité et responsabilité sociétale : l'éthique, tout simplement ! [Au passage : je ne suis pas rétribué pour cette publicité, pas plus que je n'ai d'intérêt quelconque dans cette entreprise.]
Et le client interne ?
- Selon l'adage, "le cordonnier est le plus mal chaussé". Une entreprise qui s'organise pour faire entendre la voix du client va souvent commencer par le plus évident : l'écoute du client final. Cela a du sens : l'enjeu est maximum, et le gain potentiel est le plus élevé.
- Pour autant, ce serait un erreur de se limiter à ce niveau. Chaque processus a des clients. Hervé SÉRIEYX a dit un jour "chaque service est au service", sous-entendu "au service des autres services". On ne devrait jamais observer de luttes de pouvoir entre services, entre collègues, entre directeurs.
- Un directeur financier a vocation a récupérer des informations en provenance des autres directions. Les autres directeurs doivent donc lui fournir des informations, ils sont donc dans la position du fournisseur, le directeur financier étant leur client. Ensuite, la direction financière va utiliser les données pour les transformer en information, en indicateurs que les directions opérationnelles attendent pour piloter – à cet instant, la direction financière est devenue fournisseur...
- un responsable maintenance agit comme un prestataire de service pour le responsable de production, il est donc fournisseur, mais comme il n'a qu'un unique client, il se doit de le traiter au mieux. De manière symétrique, le service maintenance étant le seul prestataire possible pour la production, il convient là aussi de le traiter au mieux.
- Le service R&D a classiquement trois clients : le marketing pour les nouveaux produits, les achats pour la validation de fournisseurs alternatifs et l'industriel pour se faire pardonner les lancements de nouveaux produits. Il n'y a pas de concurrence entre ces clients, ce qui est acquis ici bénéficiera à tous...
- que le directeur financier est le supérieur hiérarchique de ses collègues du Comité de Direction, que ces derniers ont "des comptes à lui rendre",
- que le responsable de production peut agir en pilote direct de l'activité de maintenance,
- que le responsable de la maintenance peut oublier les priorités de la production,
- que le marketing ou les achats peuvent se comporter comme le client prioritaire de la R&D, etc.
- Il appartient à la direction générale de faire passer ce message : on a créé un système de management cohérent permettant à l'organisme d'atteindre ses objectifs. Pour cela, il a été nécessaire de définir des processus qui forment alors une chaîne ou un réseau, fonctionnant de manière coordonnée pour servir le client. Le long de cette chaîne, les différents acteurs coopèrent, se passent les projets, les produits, les dossiers; apportant chacun une partie de ce qui fera la valeur pour le client. Ils doivent donc agir de sorte à optimiser les transferts, donc se comporter en fournisseurs les uns des autres – donc en clients les uns des autres !